Anaphylaxie et angio-oedème

mise à jour
Mise à jour 20/02/2021

INTRODUCTION/GÉNÉRALITÉ

  • L’anaphylaxie est une réaction d’hypersensibilité (ou allergique) systémique, généralisée, sévère, pouvant engager le pronostic vital.1
  • Elle survient après un délai de quelques minutes à quelques heures suivant l’exposition à un facteur déclenchant. 1
  • Elle se caractérise par l’apparition brutale d’une atteinte des voies aériennes, supérieures ou inférieures, ou cardiovasculaire potentiellement fatale. Elle est généralement, mais pas systématiquement, associée à une atteinte cutanéomuqueuse.1 Des signes digestifs peuvent également être présents. Les symptômes dépendent des organes impactés et évoluent rapidement.
  • Les recommandations internationales se sont accordées sur le terme d’anaphylaxie et n’utilisent plus l’expression « choc anaphylactique » qui focalise sur l’atteinte cardiovasculaire et est responsable d’une sous-évaluation des symptômes respiratoires et digestifs, à l’origine d’un défaut de diagnostic. De plus, l’identification parfois difficile d’un facteur déclenchant et la symptomatologie atypique ou rapidement résolutive participent à une utilisation insuffisante de l’adrénaline (moins d’un tiers des anaphylaxies).1 1
  • L’œdème de Quincke correspond à une infiltration des couches profondes de la peau pouvant atteindre les muqueuses des voies aériennes et conduire alors à une asphyxie.

HISTORIQUE

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PHYSIOPATHOLOGIE

  • Les mécanismes physiopathologiques de l’anaphylaxie sont complexes et encore incomplètement explorés.
  • On distingue les mécanismes immunologiques (dépendants ou non des IgE) des mécanismes non immunologiques (activation directe des mastocytes).1
  • Classiquement, l’anaphylaxie est une réaction d’hypersensibilité allergique IgE médiée : la majorité des anaphylaxies sont causées par des anticorps IgE.
    • Lors d’un premier contact avec l’antigène (allergène), phase cliniquement silencieuse (phase de sensibilisation = Cette période de sensibilisation ne s'accompagne d'aucun symptôme et sa durée est variable), des IgE sont synthétisées par les lymphocytes B et se fixent sur les mastocytes tissulaires et les basophiles circulants par leurs récepteurs membranaires de forte affinité. 
    • Après un délai, lors d’un deuxième contact, le portage des IgE par l’allergène entraîne une activation des mastocytes puis leur dégranulation, libérant les médiateurs de la phase immédiate. La dégranulation des médiateurs préformés, stockés dans les granules mastocytaires (histamine, sérotonine, chémokines, tryptase, chymase, etc.) est suivie par la production de médiateurs néoformés dans les minutes (leucotriènes, prostaglandines, thromboxane, facteur d’activation plaquettaire) ou les heures (cytokines, facteurs de croissance) suivant l’activation mastocytaire 1 1 = Cela provoque une réaction inflammatoire et des symptômes vont apparaître en quelques minutes le plus souvent (moins de deux heures).

  • Les IgE peuvent reconnaître une séquence de l’antigène (épitope) commune à différents allergènes, expliquant les réactions allergiques sans contact préalable évident. Il s’agit de réactions allergiques croisées. La détection d’IgE dans le sang reflète un contact antérieur avec un allergène, mais ne préjuge pas d’une réaction clinique lors de contacts ultérieurs avec l’allergène.1 Les manifestations cliniques observées résultent des actions biologiques initiées par les nombreux médiateurs pro-inflammatoires libérés.1 1 L’histamine est le médiateur le plus connu. Il joue un rôle majeur dans la symptomatologie. Les autres médiateurs potentialisent et prolongent l’action de l’histamine, avec parfois des effets plus puissants. Le facteur d’activation plaquettaire peut à lui seul induire une anaphylaxie.1

  • Ces médiateurs provoquent une contraction des muscles lisses du tractus digestif, une bronchoconstriction, un œdème des voies aériennes et une hypersécrétion de mucus, une vaso- dilatation associée à une augmentation de la perméabilité capillaire responsable d’une extravasation plasmatique. Le myocarde peut être un organe cible,1 directement ou indirectement impacté. La richesse en mastocytes du tissu myocardique pourrait expliquer des manifestations cardiaques sévères précoces.1 Des syndromes coronariens aigus (ou syndrome de Kounis) ont été décrits.1

  • Les médiateurs impliqués, les organes impactés et la réponse physiologique compensatrice de l’organisme (mise en jeu du système rénine–angiotensine–aldostérone et sécrétion accrue de catécholamines endogènes) déterminent les symptômes et la sévérité de l’anaphylaxie. Les pathologies préexistantes (asthme, cardiopathies), les facteurs extrinsèques (exercice, infection intercurrente, consommation d’alcool, facteurs endocrinologiques …), les traitements médicamenteux en cours et le polymorphisme génétique peuvent également influer sur la sévérité.1 1

ÉPIDÉMIOLOGIE

  • L’anaphylaxie est la manifestation la plus sévère de l’allergie.
  • En Europe, la prévalence a été évaluée à 0,3 %.
  • L’incidence est en augmentation, comprise entre 1,5 et 7,9 pour 100 000 personnes par an.1
  • En France, la prévalence des décès par anaphylaxie est de 0,84 par million d’habitants et par an.
  • Le délai médian d’apparition d’un arrêt cardiaque (AC) est respectivement de 30, 15 et 5 minutes pour les anaphylaxies induites par les aliments, les hyménoptères et les médicaments intraveineux (IV).1

  • Les décès sont le plus souvent secondaires à une détresse respiratoire (86 %) en cas d’anaphylaxie alimentaire et à une atteinte cardiovasculaire en cas d’anaphylaxie médicamenteuse ou liée aux hyménoptères.1 

https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0091674917303421?via%3Dihub

 

FACTEURS DE RISQUE

A) Facteur déclenchant

  • Chez l’enfant, l’aliment est le principal facteur déclenchant alors que les médicaments et les venins d’hyménoptères sont plus fréquents chez l’adulte.
  • Certains patients très fortement sensibilisés peuvent réagir à des quantités minimes d’allergènes (traces).

En Europe, les principales causes d’anaphylaxie sont :

  • Les aliments (65 % chez l’enfant et 20 % chez l’adulte) : pratiquement tous les aliments peuvent entraîner une anaphylaxie que ce soit par ingestion, ou plus exceptionnellement par inhalation ou contact cutané.1 L’arachide, les fruits à coque 1 1 et les protéines de lait de mammifères (vache, brebis et chèvre) pour les moins de 16 ans sont plus fréquemment incriminés dans les anaphylaxies alimentaires sévères, voire létales.1
  • Le venin d’insectes (20 % chez l’enfant et 48 % chez l’adulte).
  • Les médicaments (4,8 % chez l’enfant et 22 % chez l’adulte) 1 : les antibiotiques, principalement les bêtalactamines et les anti-inflammatoires non stéroïdiens, sont les plus souvent cités.1 1 
  • Autre : le latex peut également être incriminé, en particulier en milieu hospitalier. 
  • Dans 20 % des cas, le facteur déclenchant n’est pas identifié. 

B) Facteurs aggravants

Certaines comorbidités augmentent le risque d’anaphylaxie sévère ou létale :

  • L’asthme (en particulier pour l’allergie alimentaire de l’enfant), les pathologies cardio- vasculaires et les désordres mastocytaires.
  • Certains traitements augmentent également ce risque : les inhibiteurs de l’enzyme de conversion et les β‐bloquants.1 Tous les traitements antihypertenseurs pourraient majorer sa gravité.1
  • Des anomalies du métabolisme des médiateurs de l’anaphylaxie (tryptase, histamine, facteurs d’activation plaquettaire, bradykinine) pourraient expliquer la sévérité de certaines formes.
  • Des cofacteurs peuvent amplifier la réaction anaphylactique : l’effort, la prise d’alcool ou d’anti-inflammatoire non stéroïdien, le stress, les épisodes infectieux, la fièvre et la période périmenstruelle.1 Ils sont retrouvés dans 20 à 30 % des anaphylaxies.1

EXAMEN CLINIQUE

A) L’anaphylaxie est un diagnostic clinique.

  • Il s’agit d’une pathologie rapidement évolutive : elle se caractérise par l’installation brutale de symptômes concernant plusieurs organes et apparaissant après un délai de quelques minutes à quelques heures après l’exposition à un facteur déclenchant. Ce délai varie notamment en fonction de son mode de pénétration dans l’organisme. 
  • Les manifestations cutanéomuqueuses isolées ne constituent pas une anaphylaxie : elles ne sont toutefois pas à négliger, car elles peuvent être inaugurales d’une authentique anaphylaxie. 
  • Les symptômes varient d’un patient à l’autre et, chez un même patient, d’un épisode anaphylactique à l’autre :
    • Il n’existe pas de facteur prédictif de la sévérité d’une anaphylaxie au début de son évolution, et le décès peut survenir en quelques minutes quel que soit le symptôme inaugural. 
    • Toutefois plus les manifestations cliniques apparaissent précocement après le contact avec le facteur déclenchant, plus la sévérité est importante.
  • L’anaphylaxie peut se manifester par un ACR inaugural, un choc avec une défaillance multiviscérale, une détresse respiratoire (asthme aigu ou dyspnée laryngée)
  • L’anaphylaxie peut s’aggraver progressivement (forme protractée) ou avoir une évolution biphasique :1
    • L’évolution biphasique concernerait 0,4 à 23 % des patients. 
    • La deuxième phase survient habituellement 4 à 12 heures après les premiers symptômes, 72 heures au maximum, et peut être plus sévère que les manifestations initiales. 
    • Elle pourrait être favorisée par un retard ou un défaut d’administration d’adrénaline ou de corticoïdes.1 
    • Elle justifie la surveillance des patients au moins six heures en SU.1
    • L’anaphylaxie peut aussi être rapidement et spontanément résolutive.
    • Il est indispensable de prendre en compte les symptômes et signes cliniques initiaux, décrits par le patient ou son entourage, afin de ne pas sous-évaluer le tableau clinique.

B) Les critères cliniques d’anaphylaxie

Définis par Sampson et al.1 et repris par les recommandations internationales, ils ont une sensibilité de 97 % et une spécificité de 82 %.1

C) Symptômes de l’anaphylaxie.

Les signes cutanéomuqueux sont fréquents (84 %) et évocateurs. Ils peuvent toutefois être absents, en particulier lors du collapsus inaugural de l’adulte 1 1 et dans environ 15 % des anaphylaxies de l’enfant.

 

EXAMENS COMPLÉMENTAIRES

  • Le dosage des marqueurs de dégranulation mastocytaire n’a pas pour but le diagnostic initial ni le traitement en urgence d’une anaphylaxie. Il ne doit pas en retarder le traitement. Un taux normal (quel que soit le marqueur) ne permet pas d’exclure le diagnostic. Leur sensibilité varie en fonction du délai entre la réaction et le prélèvement et en fonction de la sévérité de la réaction.
  • Tryptase : 
    • La tryptase est la protéase la plus abondante stockée dans les granules mastocytaires.

    • Son taux n’augmente significativement qu’à partir de 15 minutes ou plus après l’apparition des signes cliniques, avec un pic à deux heures. 1

    • Sa demi-vie est d’environ deux heures. Seule l’interprétation de la cinétique de la tryptasémie peut apporter la preuve de la dégranulation mastocytaire contemporaine des symptômes d’anaphylaxie (chronologie des prélèvements).1 1 La « tryptase au pic » peut ne pas dépasser la valeur supérieure de référence, en particulier dans l’anaphylaxie alimentaire, si les réactions sont peu sévères, sans hypotension artérielle.

    • Le premier prélèvement (tryptase au pic) est à réaliser 30 minutes à 2 heures après le début des signes cliniques. De faux-négatifs peuvent être observés si le prélèvement est réalisé dans les 30 premières minutes.
    • Le deuxième prélèvement (tryptase basale) est prélevé 24 heures après la résolution des symptômes ou à l’occasion du bilan allergologique.
  • Histamine : 
    • L’augmentation de l’histamine plasmatique témoigne de la dégranulation des mastocytes et des basophiles.
    • La libération est immédiate et sa demi‑vie très courte (15 à 20 minutes). Son dosage n’est pas à faire en routine.

DIAGNOSTICS DIFFÉRENTIELS

Du fait de la pluralité des atteintes d’organes, de nombreux diagnostics différentiels peuvent être évoqués,1 dont :

A) Une exacerbation d’asthme 

  • Les symptômes (respiration sifflante, toux et dyspnée) portent à confusion, car ils peuvent être présents en cas d’anaphylaxie, mais le prurit, l’urticaire, l’angio-œdème, les douleurs abdominales intenses et l’hypotension ne sont pas présents en cas d’asthme.

B) Une attaque de panique 

  • Elle peut comporter une sensation de mort imminente, une dyspnée, un flush, une tachycardie ou des symptômes gastro-intestinaux, mais elle n’est pas associée à une urticaire, un angio-œdème, une dyspnée sifflante ou une hypotension.

C) Autres :

  • Les envenimations, les intoxications histaminiques, la scombroïdose (thon, maquereaux), les intoxications alimentaires, les empoisonnements et les chocs d’autres étiologies.

D) L’angio-œdème bradykininique non histaminique 1 1

1) Définition 

  • L’œdème angioneurotique est désormais appelé angioedème bradykinique (AE), la bradykinine étant le médiateur responsable de l’augmentation de la perméabilité capillaire
  • L’angio-œdème bradykinique se différencie de l’origine allergique par ses caractéristiques cliniques évocatrices et l’inefficacité du traitement par antihistaminiques, corticoïdes ou adrénaline. 
  • Son diagnostic doit être rapide, car le pronostic peut être particulièrement grave en cas d’atteinte laryngée, imposant un traitement spécifique en urgence.1

2) Clinique 

  • L’angioedème se caractérise par un Œdème (gonflement)  des tissus sous-cutanés ou sous-muqueux localisé et soudain 1, blanc, non prurigineux ni inflammatoire, récidivant plus ou moins fréquemment et disparaissant sans séquelles. Il est lié à l’augmentation rapide et localisée de la perméabilité capillaire sous l’effet de médiateurs vasoactifs.
  • L’atteinte laryngée est la cause principale de décès (25% de décès en l’absence de thérapeutique adaptée).
  • Les œdèmes peuvent toucher le tube digestif ; ils se manifestent par un tableau sub-occlusif avec risque d’hypotension.

3) Etiologie

Les causes peuvent être héréditaires ou acquises et notamment iatrogènes. Il existe deux grandes familles d’AE bradykiniques :

  • les formes associées à un déficit en C1Inh héréditaires (AEH de type I et II) ou acquises (AEA),
  • les formes à C1Inh normal qui peuvent être héréditaires (AEH de type III), ou d’origine médicamenteuse (IEC ou aux antagonistes de l’angiotensine II).

4) Traitement

  • Le traitement de l’AE bradykinique comprend la prise en charge des crises aiguës, ainsi que la prophylaxie à long et à court terme.
  • Des protocoles sont régulièrement élaborés et révisés par les experts membres du CREAK et sont disponibles en ligne sur le site AngioedèmeXpert
  • Pour les crises sévères (toute atteinte au-dessus des épaules ; crises abdominales avec EVA >5) : l'icatibant (Firazyr®) et les concentrés de C1Inh (Bérinert® ou Cinryze®) doivent être utilisés le plus rapidement possible.

5) Prophylaxie

  • La prophylaxie à long terme est recommandée chez tout patient ayant plus de 5 crises par an. Elle repose sur la prise de traitements oraux (danazol et acide tranexamique).
  • La prophylaxie à court terme a pour objectif d’éviter l’apparition des crises lors de situations à risques, traumatisme, période périopératoire, accouchement et les soins dentaires. Le stress et la douleur peuvent déclencher une crise.
  • En cas d’intervention chirurgicale, l’utilisation de Concentré de C1 Inh (Berinert®) est habituellement proposée à la dose de 20 UI/kg en IV lente lors de l’induction anesthésique.

ÉTIOLOGIE

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COMPLICATIONS

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PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE

  • Le principe de prise en charge repose sur le traitement de l’urgence vitale immédiate, l’administration précoce par voie IM d’adrénaline, l’éviction de l’aller‐ gène et l’instauration rapide des traitements complémentaires à adapter à la symptomatologie et à la sévérité clinique.1 1
  • La prise en charge de l’anaphylaxie IgE médiée est plus spécifiquement décrite. Mais les recommandations sont applicables quel que soit le mécanisme physiopathologique. 1
Algorithme de prise en charge d’une anaphylaxie en SU. ​​​(Ann. Fr. Med. Urgence (2016) 6:342-364)

A) Adrénaline 

  • C’est le traitement de l’anaphylaxie.

  • Il est nécessaire de prendre en compte le caractère évolutif de l’anaphylaxie et de traiter le patient sans attendre l’apparition d’une détresse vitale (administrer le plus tôt possible.)

  • Une réponse clinique efficace est obtenue pour la majorité des patients après une à deux injections par voie IM.

  • Elle n’a pas d’indication pour une réaction d’hypersensibilité sans atteinte respiratoire ni cardiovasculaire, par exemple une urticaire avec un angio-œdème de la face et une rhinorrhée. En cas d’anaphylaxie sans signe cardiorespiratoire, mais avec des symptômes digestifs, l’intérêt de son utilisation précoce est à évaluer par le praticien, en fonction des antécédents allergiques, de l’importance et de l’évolutivité des symptômes.

  • Il n'existe aucune contre-indication absolue à l’utilisation d’adrénaline en cas d’anaphylaxie, y compris chez les patients âgés, en cas de grossesse, ou s’il existe une comorbidité cardiovasculaire associée.

1) Actions pharmacologiques

  • L’adrénaline est un sympathomimétique à action directe. 
  • L’effet α‐adrénergique agoniste est vasoconstricteur. Il réduit l’œdème à l’origine de l’obstruction des voies aériennes et augmente les résistances vasculaires périphériques.
  • L’effet β1‐adrénergique agoniste est inotrope et chronotrope positif.
  • L’effet β2‐adrénergique agoniste est bronchodilatateur. Il bloque l’activation mastocytaire, réduisant la libération des médiateurs de l’anaphylaxie.

2) Adrénaline par voie intramusculaire

  • La voie d’administration recommandée est la voie intra-musculaire (IM). 1 1 Elle est efficace, bien tolérée et facilement accessible à tout âge et en particulier chez l’enfant et le nourrisson.1 1
  • Le site d’injection recommandé est la face latéroexterne du tiers moyen de la cuisse, y compris chez les patients traités par antithrombotiques.
  • L’adrénaline précoce par voie intra-musculaire (0,01 mg/kg, maximum 0,5mg) est indiquée pour toute anaphylaxie.1 Elle doit être renouvelée au bout de 5 à 10 minutes en cas d’aggravation ou de réponse clinique insuffisante.
  • En cas d’appel au cabinet pour une symptomatologie anaphylactique chez un allergique connu, il faut faire administrer l’adrénaline avec un stylo auto-injecteur d’adrénaline (AIA) si disponible, par le patient lui-même ou par toute autre personne présente puis appeler ou faire appeler le 15. Cette injection ne nécessite pas la présence d’un médecin ou d’un infirmier et peut être réalisée par le patient ou par un de ces proches. L’utilisation d’un AIA constitue probablement un gain de temps et sécurise la dose délivrée. Pour les enfants de moins de 15 kg, il n’existe pas d’AIA adapté. L’European Academy of Asthma and Clinical Immunology (EAACI) préconise toutefois l’utilisation des AIA dosés à 150 μg à partir de 7,5 kg.1
  • Certains effets secondaires peuvent survenir : pâleur, céphalées, palpitations transitoires, tachycardie, nausées. Ils ne doivent pas être confondus avec des signes d’anaphylaxie persistante 

3) Adrénaline par voie intraveineuse directe

  • La voie IV n’est pas recommandée en première intention et l’administration d’adrénaline par voie intraveineuse directe (IVD) impose une titration,1 et son utilisation ne peut se concevoir que par une équipe médicale entraînée avec une surveillance électrocardiographique et un défibrillateur.1 1
  • La fenêtre thérapeutique de l’adrénaline par voie IV est étroite, et il existe une sensibilité individuelle imprévisible. Les effets secondaires graves observés par voie IV sont : fibrillation ou tachycardie ventriculaire, poussée hypertensive, accident vasculaire cérébral, œdème pulmonaire, syndrome coronarien aigu.
  • En raison du risque d’arythmie létale souvent secondaire à une erreur de posologie, la voie IVD devrait être réservée au risque imminent d’AC,1 aux formes réfractaires, ou devant une instabilité hémodynamique sévère chez un patient déjà perfusé.

4) Adrénaline par voie intraveineuse continue

  • La perfusion continue d’adrénaline par voie intraveineuse à la seringue électrique (IVSE) semble assurer une amélioration plus soutenue de la pression artérielle,1 alors que les titrations par voie IV ont un effet immédiat, mais de courte durée et présentent un risque arythmogène.
  • La perfusion par voie IVSE doit rapidement remplacer la voie IM si les injections répétées se révèlent inefficaces ou en cas d’instabilité hémodynamique sévère.1 1 1
  • La posologie, par voie IVSE, doit être ajustée à la réponse clinique obtenue. En cas de choc, l’objectif hémodynamique est une pression artérielle moyenne (PAM) de 60 mmHg chez l’adulte.1

5) Adrénaline par aérosol

  • L’adrénaline en aérosol est proposée par certains experts en cas d’anaphylaxie avec atteinte des voies aériennes supérieures en complément de l’adrénaline par voie IM.1 1

6) Adrénaline dans la prise en charge de l’anaphylaxie de l’adulte

7) Adrénaline dans la prise en charge de l’anaphylaxie de l’enfant.

B) traitements complémentaires :

1) Eviction de l’allergène : 

  • Arrêter une perfusion en cours (antibiotique, produit de contraste radio-opaque ou gélatine par exemple)
  • Eviter tout contact avec du latex.
  • Il ne faut pas essayer de provoquer de vomissements en cas d’ingestion. 1
  • En cas de piqûre d’hyménoptère, l’ablation du dard est sujette à discussion (risque de compléter l’injection de venin par la pression du sac à venin).

2) Libération des voies aériennes supérieures et oxygénothérapie

  • La liberté des voies aériennes doit être assurée.
  • Une oxygénothérapie à fort débit est à débuter rapidement en cas de choc, d’hypotension ou de dyspnée.
  • Dans le cadre d’une anaphylaxie, l’intubation peut être difficile (œdème laryngé), une voie d’accès sous glottique est par- fois nécessaire.

3) Expansion volémique

  • En cas d’instabilité cardiovasculaire après la première injection d’adrénaline IM, une expansion volémique doit être débutée par du sérum salé isotonique (ou du Ringer-lactate), à la dose de 20 ml/kg chez l’adulte et chez l’enfant, à adapter et renouveler en fonction de la réponse hémodynamique.
  • Cette expansion volémique doit être rapide,1 puisque 5 à 10 mL/kg doivent être perfusés dans les cinq premières minutes.
  • Une attention particulière sur la réponse au remplissage devrait être apportée chez les patients insuffisants cardiaques.

4) Bronchospasme associé

  • En cas de bronchospasme associé, les β2‐mimétiques d’action rapide doivent être débutés rapidement, en complément de l’adrénaline par voie IM.
  • En cas de bronchospasme réfractaire, se référer aux recommandations en vigueur sur l’asthme aigu grave.1

5) Positions d’attente : sans retarder l’injection d’adrénaline, le patient doit être installé d’une manière confortable et adaptée à la situation 

  • En position de Trendelenburg stricte si instabilité hémodynamique ou malaise et éviter toute mobilisation intempestive ou orthostatisme. Le relevage doit être proscrit en l’absence d’une prise en charge médicale (risque de désamorçage de la pompe cardiaque);
  • En position demi‑assise en cas de détresse respiratoire ;
  • En décubitus latéral gauche en cas de grossesse ;
  • En position latérale de sécurité en cas de troubles de la conscience.

6) Corticoïdes

  • Ils ne constituent pas un traitement d’urgence de l’anaphylaxie et ne doivent pas se substituer à l’adrénaline.1
  • Ils sont utilisés en prévention de la réaction biphasique, à la dose de 1 à 2 mg/kg de prednisolone par voie orale ou de méthylprednisolone par voie IV en cas de vomissements.
  • Cependant, leur efficacité n’a jamais été démontrée.1

7) Antihistaminiques

  • En cas d’anaphylaxie, les antihistaminiques H1 sont classiquement utilisés, mais leur efficacité n’a jamais été démontrée.1
  • Ils ne sont efficaces que sur les symptômes cutanéomuqueux.
  • L’injection rapide par voie IV d’antihistaminiques peut provoquer une hypotension.
  • La voie orale peut être utilisée.

D) Mesures post-urgence :

  • Au terme de la prise en charge initiale, un temps d’information et d’éducation est nécessaire.
  • Remplir la check list : Check-list HAS 2013: Conduite à tenir après le traitement d’urgence d’une suspicion d’anaphylaxie
  • Tous les patients doivent être adressés vers une consultation d’allergologie pour une prise en charge diagnostique, thérapeutique et éducationnelle : ce bilan permet d’identifier le mécanisme immunologique en cause, le facteur déclenchant, d’évaluer le risque d’allergie croisée, les facteurs de risque individuel et de récurrence. Une prise en charge thérapeutique pourra être mise en place. Les mesures de prévention et d’éducation thérapeutique seront rappelées. Il peut aussi permettre d’infirmer un diagnostic d’allergie et d’autoriser la reprise de certains médicaments ou aliments. Un diagnostic abusif d’allergie est fréquent et peut être préjudiciable en contre-indiquant inutilement un médicament ou un aliment.1 1
  • Pharmacovigilance et Réseau allergovigilance : tout effet indésirable d’un médicament, produit biologique ou cosmétique, doit être déclaré à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Cette décla- ration peut être faite en ligne. Les anaphylaxies peuvent être déclarées également au Réseau allergovigilance (www.allergyvigilance.org).

Avant le retour à domicile et en attente d’une consultation spécialisée avec un allergologue, il est vivement conseillé que les patients sortent avec : 1

  • Une fiche de conseils mentionnant les éléments : 
    • l’éviction de tout allergène supposé (lorsque l’allergène est clairement identifié, que son éviction est simple et que sa réintroduction ne peut être fortuite (ex. : produit de contraste radio-opaque), il n’est pas indispensable de prescrire un AIA.)
    • une information sur le risque de réaction biphasique
    • lister les médicaments et aliments pris
    • les symptômes d’anaphylaxie 
    • les consignes écrites précisant de façon claire et lisible les indications, la posologie et le mode d’emploi des produits prescrits

  • Une prescription de :
    • β2‐mimétique inhalé en cas de bronchospasme.
    • Un corticoïde par voie orale (prednisolone ou prednisone, 1 mg/kg par jour, maximum 60 mg) et un antihistaminique par voie orale sont habituellement prescrits pour une durée de trois à cinq jours, afin de traiter respectivement œdème et prurit.
    • Adrénaline sous forme d’AIA adapté au poids.1 En cas d’anaphylaxie, la Haute autorité de santé préconise la prescription systématique de deux AIA dont l’utilisation doit être expliquée et si possible montrée.
  • Un compte rendu exhaustif d’hospitalisation.

 

ÉVOLUTION/PRONOSTIC

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PRÉVENTION

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SURVEILLANCE

  • La surveillance initiale comporte une surveillance continue de la fréquence cardiaque, de la fréquence respiratoire, de la SpO2 et une mesure de la pression artérielle toutes les deux à cinq minutes.
  • La recherche de l’apparition ou de la récidive de signes cutanés, muqueux ou digestifs est à effectuer à intervalles réguliers, toutes les 30 minutes.
  • La durée de surveillance de l’anaphylaxie est de six heures au minimum après résolution de l’épisode.
  • En cas d’atteinte respiratoire sévère ou cardiovasculaire, la surveillance est prolongée, allant de 12 à 24 heures.
  • La surveillance clinique initiale du patient ayant présenté une anaphylaxie peut être réalisée en SAUV, en unité d’hospitalisation de courte durée (UHCD), en pédiatrie, en unité de surveillance continue ou en réanimation, en fonction de la gravité initiale.

CAS PARTICULIERS

A) Chez le nourrisson

  • Le diagnostic est souvent plus difficile, avec des signes digestifs ou respiratoires non spécifiques, des signes cutanéo-muqueux fugaces. 
  • En cas d’allergie alimentaire, l’anaphylaxie est inaugurale pour 30 à 60 % d’entre eux. 
  • Le tableau clinique peut aussi être un épisode de somnolence ou de léthargie par atteinte cardiovasculaire ou se présenter sous la forme d’une mort subite.1

B) Oedème de Quincke

  • Il s’agit d’une forme localisée de réaction allergique dont la physiopathologie est semblable à celle de l’anaphylaxie (dont l’Œdème de Quincke est une forme).
  • Il se traduit par un gonflement des muqueuses de la face et de la filière ORL pouvant conduire à l’obstruction et à l’asphyxie.
  • Il nécessite une prise en charge urgente qui est strictement identique à celle de l’anaphylaxie, des précautions particulières seront prises afin de permettre la libération des voies aériennes.

C) Choc anaphylactique réfractaire

Le choc anaphylactique est considéré comme réfractaire quand la PAM reste inférieure à 60 mmHg chez l’adulte, et inférieure aux normes pour l’âge chez l’enfant, malgré des injections répétées d’adrénaline, une perfusion continue d’adrénaline et une expansion volémique adaptée.1 1 Les thérapeutiques suivantes peuvent être proposées, en association aux thérapeutiques précédentes :

  • La noradrénaline peut être utilisée pour lutter contre la vasodilatation à la dose initiale de 0,1 μg/kg par minute.
  • Les patients traités par β‐bloquants peuvent nécessiter une augmentation précoce des doses d’adrénaline, en raison d’un antagonisme compétitif sur les récepteurs β. En l’absence d’amélioration, le glucagon est préconisé pour son effet chronotrope et inotrope, par voie intraveineuse lente (IVL) à la dose de 1 à 2 mg toutes les cinq minutes puis 5 à 15 μg·kg-1 par minute par voie IVSE chez l’adulte [52]. Par ailleurs, certains experts proposent chez les enfants la dose initiale de 0,03 à 0,1 mg·kg-1 (maximum de 1 mg par dose) [56]
  • Expérimentalement, le bleu de méthylène pourrait être efficace pour lutter contre la vasoplégie à la posologie de 1,5 mg/kg par voie IVL.1

D) Choc anaphylactique chez la femme enceinte

  • En cas de choc, la prise en charge est identique avec injection d’adrénaline, oxygénothérapie et expansion volémique.1
  • L’éphédrine anciennement proposée n’apparaît plus dans les recommandations de la Société française d’anesthésie et de réanimation.
  • Il faut contrôler immédiatement et de manière rapprochée l’activité cardiaque fœtale, afin de définir la conduite à tenir obstétricale.1

E) Syndrome de Kounis

  • Les médiateurs de l’anaphylaxie peuvent induire un spasme coronarien, une rupture de plaque d’athérome et une occlusion coronaire.1
  • L’ECG réalisé le plus tôt possible contribue au diagnostic de syndrome coronarien aigu.
  • Il faut traiter l’anaphylaxie en priorité, puis discuter l’orientation du patient vers un plateau technique de cardiologie interventionnelle.

F) Syndromes de vasoconstriction cérébrale réversible et Tako-Tsubo

  • Ces syndromes associés à une anaphylaxie ont été rapportés dans la littérature, avec ou sans injection d’adrénaline, comme dans d’autres situations de stress aigu.1 1

G) Réflexe de Bezold-Jarisch

  • C’est une bradycardie paradoxale qui peut survenir au cours d’une hypovolémie majeure.
  • C’est un mécanisme physiologique adaptatif qui permet au ventricule de se remplir avant contraction.
  • Le traitement consiste en une expansion volémique initiale et l’injection d’adrénaline titrée.
  • L’administration initiale d’atropine, pouvant conduire à un AC, n’est pas conseillée.1

H) Anaphylaxie chez le patient avec une cardiopathie ischémique sévère

  • À l’exception d’une détresse vitale, la balance bénéfice/ risque de l’adrénaline pour ces patients est à évaluer avec précaution.1

THÉRAPIES FUTURES

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