Syndrome de l'artère poplitée piégée

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Mise à jour 09/09/2020

INTRODUCTION/GÉNÉRALITÉ

  • Le syndrome de l'artère poplitée piégée est une forme d'artériopathie non athéromateuse.
  • Cette pathologie est en rapport avec une anomalie du développement embryolo­gique artériel ou musculaire à l'origine d'une compression extrinsèque de l'artère poplitée et donc de la symptoma­tologie clinique.
  • Ce syndrome doit être évoqué chez tout patient âgé de moins de 50 ans, sans facteur de risque cardio­ vasculaire, présentant soit une claudication artérielle intermittente aggravée par l'exercice physique intense soit une ischémie critique du membre inférieur.
  • Le caractère intermittent de la compression vasculaire explique la très fréquente latence clinique de cette affection qui concerne essentiellement l'adulte jeune et sportif. Cependant l'évo­lution vers des complications ischémiques est possible, complications qui peuvent être inaugurales et sévères. 
  • Des manœuvres cliniques particulières associées à l'ima­gerie permettent un diagnostic précis. 
  • Le traitement est principalement chirurgical. Il permet d'obtenir la guérison sans séquelle s'il est entrepris tôt, avant le stade de complication.

HISTORIQUE

  • C'est en 1879 que Stuart1 décrit le premier cas de piège poplité, puis en 1959, Hamming1 rapporta le premier cas opéré.
  • En 1965, Love et Whelan1 ont pour la première fois proposé le terme de popliteal artery entrapment syndrome et en 1962, Servello1 notait une diminution des pouls distaux en flexion dorsale ou en flexion plantaire forcée.

EMBRYOLOGIE

  • Les muscles et les artères du membre inférieur ont un déve­loppement embryologique simultané. Un décalage dans ce développement peut être source d'un piège poplité. 

A) Embryologie musculaire 

  • Le blastomère du calcanéum donne naissance aux muscles gastrocnémiens qui vont décrire une migration ascendante en direction de l'épiphyse fémorale distale. 
  • Au stade 14 mm, les chefs médial et latéral sont individua­lisés. Le chef latéral termine sa migration et se fixe au stade 20 mm. Le chef médial poursuit sa migration ascendante. Il se fixe plus haut sur la métaphyse, sous le canal de Hunter au contact de l'artère poplitée. 

B) Embryologie artérielle 

  • Senior1, en 1919, a décrit l'embryologie artérielle du membre inférieur. L'artère poplitée embryonnaire est ini­tialement le prolongement d'une artère axiale primitive appelée artère ischiatique. Entre la sixième et la dixième semaine, le membre inférieur décrit une rotation de 180 degrés médialement et une extension de 90 degrés. Au cours de cette rotation, l'artère ischiatique involue. Elle laisse place à l'artère iliaque externe et à l'artère fémorale qui se développent dans un plan plus ventral. La partie proximale de l'artère poplitée provient de la fusion entre le plexus fémoral en cours de développement et le reliquat poplité de l'artère ischiatique. Sa portion moyenne dérive directement de l'artère ischiatique. La portion distale de l'artère poplitée primitive involue entre le stade 20 et le stade 22 mm.1

ÉPIDÉMIOLOGIE

  • Il s'agit d'une pathologie rare mais probablement sous­ estimée qui touche préférentiellement les hommes1 (2/1), jeunes (plus de 50 % ont moins de 30 ans).
  • Chez deux tiers des sujets, le piège poplité est bilatéral.1
  • Ce syndrome est plus fréquemment observé chez les sujets sportifs, mettant en avant le rôle aggravant de l'hypertrophie musculaire. La pratique de certains sports favoriserait l'apparition de la symptomatologie par hypertrophie des gastrocnémiens (cyclisme, natation, basket et danse).
  • L'incidence réelle est inconnue, évaluée entre 0,165 et 3 %. 
  • Cette pathologie touche préférentiellement le sujet jeune et sportif en raison d'une hypertrophie des muscles gastrocnémiens.

CLASSIFICATION

Les classifications sont nombreuses. Elles sont pour la majo­rité basées sur le développement embryologique. La plus utilisée est la classification de Whelan.1 Elle comprend quatre types : 

  • type I : l'artère poplitée passe en dedans du chef médial du gastrocnémien, puis sous l'arcade du soléaire pour rejoindre son trajet habituel ; 
  • type II : le muscle gastrocnémien médial s'insère plus haut et plus latéralement sur l'épiphyse fémorale distale, l'artère poplitée passant en dedans et décrivant un trajet quasi rectiligne ; 
  • type III : l'artère poplitée est en position normale. Elle est comprimée par une bandelette tendineuse aberrante ou un faisceau musculaire provenant du muscle gastrocné­ mien médial et s'insérant sur le condyle externe ; 
  • type IV : l'artère poplitée passe en avant du muscle poplité ou d'une formation fibreuse ayant la même position ana­tomique, le tout s'associant ou non à un type I. 
  • Un type V a été défini par Rich et al. lorsque le piège est responsable d'une compression de la veine poplitée, quel que soit le type.
  • Un type VI du syndrome de l'artère poplitée pié­gée a été décrit pour les patients présentant des signes de compression de l'artère poplitée au cours des manœuvres cliniques dynamiques sans anomalie anatomique retrou­vée par les examens morphologiques. Ce type VI a été nommé syndrome de l'artère poplitée piégée fonctionnel.1 1 Différentes hypothèses pour expliquer ce phénomène ont été avancées. Certains auteurs mettent en cause la migration incomplète du chef médial du gas­trocnémien, responsable d'une position plus latérale de son extrémité proximale. Dans ce cas, une hypertrophie musculaire pourrait être plus facilement responsable d'une compression artérielle en flexion plantaire forcée ou en flexion dorsale. D'autres auteurs mettent en cause une compression de l'artère poplitée distale par l'arcade du soléaire (syndrome du soléaire).

EXAMEN CLINIQUE

  • La maladie se manifeste par une claudication artérielle intermittente lors des efforts soutenus, à type de douleurs vives et de crampes du mollet. Cependant, cette claudication peut être paradoxale, apparaissant lors de la station debout ou de la marche et dis­paraissant lors de la course. 
  • La claudication est le seul symptôme dans 69 % des cas, on observe des paresthésies dans 14 % des cas, des douleurs de repos et des troubles trophiques dans 11 % des cas.1 
  • Certains signes peuvent être plus atypiques tels qu'une cyanose de la jambe ou du pied à la station debout prolon­gée ou lors d'efforts musculaires, un œdème de la cheville ou du pied. Ces signes doivent orienter vers un piège veineux associé au piège artériel (type V). 
  • Dans les formes non compliquées, l'examen physique est normal lorsque le membre est laissé en position indifférente. Les manœuvres dynamiques constituent l'essentiel de l'examen clinique. On note un amortissement ou une abolition des pouls pédieux et tibial postérieur lors des manœuvres de flexion plantaire active ou de flexion dorsale passive du pied, genou en extension. L'abolition des pouls distaux est un élément très évoca­teur mais non spécifique. En effet, ces manœuvres peuvent être positives chez un certain nombre de sujets normaux. 
  • D'autres symptômes sont évocateurs de complications du piège poplité. On retiendra : l'apparition de troubles trophiques dis­taux, l'abolition d'un pouls distal, la palpation d'un ané­vrisme poplité, la perception d'un thrill ou d'un souffle au niveau de la fosse poplitée, l'ischémie aiguë ou critique du membre inférieur. 
  • Le reste de l'examen cardiovasculaire est le plus sou­vent normal, ces patients étant le plus souvent indemnes de facteurs de risque cardiovasculaire et donc de lésions d'athérosclérose.
  • Dans tous les cas, une symptomatologie fonctionnelle évocatrice doit faire poser l'indication d'un examen écho­ graphique Doppler artériel des membres inférieurs.

EXAMENS COMPLÉMENTAIRES

Les examens complémentaires sont tous menés de manière bilatérale et comparative. 

A) Examen Doppler continu 

  • Il est plus souvent normal au repos. Un frein circulatoire au repos est le signe d'une complication (occlusion ou sténose), de même qu'une altération de l'index de pression systolique. 
  • Les mêmes manœuvres dynamiques que celles décrites au cours de l'examen clinique doivent être effectuées. Elles mettent en évidence un frein circulatoire dynamique. La vitesse circulatoire est mesurée au niveau de l'artère tibiale antérieure au cou­ de­ pied ou en regard de la loge antéro­ externe. Elle est ralentie ou abolie lors des manœuvres de dorsiflexion passive ou de flexion plantaire active. 
  • La mise en tension des muscles gastrocnémiens par simple dorsiflexion passive du pied provoque un étire­ment des muscles et tendons qui entraîne la compression et la réduction progressive jusqu'à arrêt du flux Doppler continu enregistré au niveau de la tibiale antérieure quelque soit le type d'anomalie embryologique du trajet artériel (types I, II, III, IV). L'arrêt du flux tibial antérieur en dorsi­flexion passive paraît relativement spécifique pour éviter de faire des faux positifs.
  • Les manœuvres actives en dorsiflexion ou en flexion plantaire sont à interpréter avec prudence, l'hypertrophie musculaire en contraction active pouvant entraîner un « garrottage » et une compression artérielle diffuse, signant une pathologie fonctionnelle, sans spécificité sur la suspi­ cion d'une anomalie de trajet artériel. 
  • Ces manœuvres ont une spécificité faible. Leur positivité impose la poursuite des explorations. 

B) Échographie Doppler 

  • L'échographie couplée au Doppler pulsé permet une analyse morphologique du contenu de la fosse poplité.1 1 
  • Cet examen permet de mettre en évidence un trajet anor­mal de l'artère poplitée. Il peut objectiver un anévrisme ou une thrombose de l'artère poplitée. Il peut retrouver un fais­ceau musculaire ou tendineux aberrant, ou un élément ana­tomique anormal s'interposant entre artère et veine réalisant un « diastasis artérioveineux ». 
  • Les manœuvres dynamiques réalisées lors de l'échogra­phie­-Doppler peuvent mettre en évidence une compression artérielle. 
  • L'échographie permet également d'affirmer la présence de thrombus artériel ou veineux ainsi qu'un épaississement de la paroi artérielle. 
  • Les limites de l'échographie et de l'échographie­-Doppler sont liées principalement au caractère opérateur­-dépendant de cet examen mais aussi à l'échogénicité parfois limitée de certains sujets, à l'hypertrophie musculaire ou encore à une artère de calibre réduit.

Manœuvres pour la recherche d'une artère poplitée piégée.
a. Manœuvre 1 : Flexion dorsale passive du pied avec enregistrement au niveau de l'artère tibiale antérieure.
A noter ici un arrêt du flux Doppler lors de la manœuvre signant un piège poplité (entre les deux têtes de flèches) puis réapparition du flux.
b. Manœuvre 2 : Flexion plantaire contrariée avec enregistrement du flux en poplité.

Lorsque les circonstances ne sont pas favorables ou que les précédents examens ont mis en évidence une anomalie, il convient de poursuivre les explorations. 

C) Artériographie 

  • Bilatérale et comparative, elle doit comprendre l'aorte abdominale sous­-rénale et l'ensemble des deux membres inférieurs. Les mêmes manœuvres dynamiques peuvent être réalisées. Au repos, elle peut retrouver une déviation médiale du trajet artériel ou une compression artérielle localisée. Elle peut également objectiver une complication à type de thrombose, de sténose, d'anévrisme post­-sténotique ou d'anévrisme vrai de l'artère poplitée. 
  • Les réseaux artériels sus­ et sous­-jacents sont analysés. Ils sont le plus souvent indemnes de lésions sauf en cas d'ané­vrisme ayant embolisé le lit artériel d'aval à bas bruit. 
  • En cas d'occlusion de l'artère poplitée, l'artériographie ne permet pas le diagnostic de piège poplité. Seul le contexte clinique (sujet jeune) et la réalisation d'autres explorations (tomodensitométrie, angiographie par résonance magné­tique) permettront le diagnostic étiologique. 

D) Tomodensitométrie 

  • Le scanner avec injection de produit de contraste iodé objec­tive les anomalies de trajet de l'artère poplitée.
  • Il peut égale­ment retrouver un diastasis entre artère et veine.
  • De plus, il permet l'analyse de la paroi artérielle (épaississement parié­tal, dilatation anévrismale).
  • Il peut mettre en évidence des faisceaux tendineux, ligamentaires ou musculaires anormaux ou des anomalies d'insertion des muscles poplités.1 1 

E) IRM 

  • Il s'agit de l'examen de référence pour réaliser un bilan mor­phologique de la fosse poplitée.
  • Elle permet d'affirmer le diagnostic étiologique du piège poplité ainsi que le diagnos­tic des complications. 
  • Elle évite l'injection de produit de contraste iodé ainsi que les rayonnements ionisants.
  • Elle donne les mêmes ren­seignements que le scanner mais permet la réalisation de coupes dans les plans frontal et sagittal.1

DIAGNOSTICS DIFFÉRENTIELS

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ÉTIOLOGIE

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COMPLICATIONS

Inaugurales ou concluant une période plus ou moins longue de claudication artérielle intermittente, les complications sont d'autant plus fréquentes que le diagnostic de syndrome de l'artère poplitée piégée a été tardif.1 

Il s'agit de : 

  • la sténose artérielle par hyperplasie ; 
  • la thrombose artérielle aiguë ou chronique, sur artère saine ou anévrismale ; 
  • l'anévrisme post­sténotique ou par atteinte pariétale directe ; 
  • les embolies artérielles, responsables d'une altération du lit artériel d'aval. 
  • les embolies se produisent le plus souvent à bas bruit, avant d'être responsables d'une symptomatologie clinique.

La thrombose poplitée rend plus difficile le diagnostic de piège poplité. 
La survenue d'anévrisme est à l'origine des complications thromboemboliques habituelles des anévrismes poplités, avec notamment une dégradation progressive du lit d'aval.

PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE

Le traitement est uniquement chirurgical.1 Il consiste en la levée du piège artériel ou veineux auquel on associe par­ fois un geste de restauration vasculaire. Il faut différencier le traitement des formes non compliquées de celui des formes compliquées. 

A) Dans le cas des formes non compliquées

  • Le traitement se limite à la levée du piège par voie chirurgi­cale. On utilise préférentiellement une voie d'abord posté­rieure en baïonnette, patient en décubitus ventral. On inclut la totalité du pied dans le champ opératoire, ceci permet de reproduire les manœuvres dynamiques en peropératoire. Après identification de l'élément responsable du piège, ce dernier est sectionné et l'artère poplitée libérée sur toute sa hauteur. L'incision horizontale se situant dans le pli de flexion réduit le risque de troubles de cicatrisation, par contre il existe un risque de flessum post­opératoire auquel il conviendra de pallier par une mobilisation précoce de l'opéré. 
  • Dans les cas de compression artérielle par le muscle soléaire, une voie d'abord médiale poplitée sous­-articulaire permettra une section de l'arcade du soléaire et une libéra­tion artérielle. 

B) Dans le cas des formes compliquées 

  • La voie d'abord chirurgicale privilégiée est la voie médiale. En cas de restauration artérielle par pontage, le pontage en veine saphène inversée est la méthode de choix. 
  • Les anévrismes sont traités selon les techniques clas­siques, mise à plat­greffe ou exclusion­-pontage. 
  • La voie d'abord postérieure en baïonnette est aussi une voie satisfaisante, d'autant qu'elle permet aussi le prélève­ment de la veine grande saphène sur le membre opéré ou sur le membre controlatéral. La thrombectomie et la thrombo­ endartériectomie par voie postérieure sont peu utilisées, notamment en raison du risque d'occlusion post­opératoire précoce. La résection­-pontage par voie postérieure est de réalisation difficile, notamment en cas de nécessité d'exten­ sion proximale ou distale. 
  • La sympathectomie lombaire pourrait être proposée en cas de lit distal dégradé et en l'absence de possibilité de revascularisation. 
  • L'angioplastie transluminale a été utilisée par certains auteurs, le plus souvent chez des sujets dont le diagnostic de piège poplité était méconnu, associée ou non à la levée chirurgicale du piège. La fragilité artérielle accrue par les microtraumatismes répétés, associée à un calibre artériel souvent réduit, rend ces manœuvres endoluminales peu sûres et peu raisonnables. 
  • Enfin, le traitement ne doit être bilatéral en un temps qu'en cas de symptomatologie clinique ou d'examen paracli­ nique en faveur d'une complication.

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